"Viens. Allez Cosme, viens. Tu sais, c'est pas grand chose, juste un pas de l'autre côté."
Elle résonne en toi, dans ta tête, la voix de ta sœur. Et t'ouvres les yeux. Y a cette fille en face de toi, t'es perdu. T'es pas là où tu veux être. T'es pas là avec qui tu voudrais être.
"Tu dormais là ?"
Haussement de sourcils. Qu'est-ce qu'elle fout là, elle ? Depuis quand elle te regarde ?
"Tu m'espionnes là ?"
Elle sourit, naïvement. Parce qu'elle pense qu'elle et toi, c'est tout doux, c'est tout beau et tout neuf. Mais elle et toi, ça existe pas. C'est juste la fille que t'aimes bien posséder le temps d'une nuit. C'est la fille dont t'as besoin parfois, c'est celle que t'appelles mais qui n'a pas le droit de t'appeler. C'est la pauvre fille qui croit au prince charmant.
Mais toi t'es pas un prince.
Toi t'es juste Cosme.
Cosme l'enflure.
"Pourquoi t'es là ? Comment tu m'as trouvé ? Je t'ai pas appelé."
Envolé le sourire de la petite blonde. Envolées les paillettes dans les yeux. Retour à la triste réalité que tu lui imposes.
"J'me suis dit qu'on pourrait se voir. Sortir pour une fois. Faire des trucs de cou-"
"Tu vas dire une connerie."
Elle s'obstine à sourire, la demoiselle en détresse. La demoiselle qui est persuadée que Cosme, t'es quelqu'un de bien. T'es vraiment gentil comme garçon, t'es formidable à l'entendre parler. Quand elle parle de toi à ses amis, la petite blonde, elle t'idéalise. Si seulement tu voyais ça, Cosme, tu rigolerais bien. Rien que d'y penser ça te fait rire.
"Je suis pas ton jouet, Cosme."
Et pourtant. T'as ce sourire, coincé sur tes lèvres, qui lui fait comprendre qu'elle l'est malgré elle. C'est triste. C'est comme ça. C'est pas un jouet, c'est un objet. Un bel objet, fragile et qui pleure parfois. Doux et qui rigole souvent. Elle te fusille du regard. T'aimes bien ce regard-là. C'est celui que tu préfères. C'est celui que tu vois tout le temps.
"Je vais me tirer. Et tu me verras plus. Plus jamais."
T'es de marbre. T'es toujours comme ça. Mais t'as pas vraiment envie qu'elle t'abandonne. Faut pas qu'elle le fasse, parce qu'elle ressemble trop à ta sœur. Et t'en as marre de voir les filles se volatiliser. Mais tu sais qu'elle, elle le fera pas. T'as l'avantage, comme à chaque fois. Pourtant tu flippes quand elle se lève. Tu flippes mais tu dis rien.
T'encaisse, comme à chaque fois.
T'es un grand garçon.
"Je t'appelle plus tard."
Et t'offre son majeur, avec un beau sourire. Toi, comme toujours, tu rigoles.
Mais t'es pas sérieux, vraiment pas.
T'es pas un gentil garçon, vraiment pas.
Pourtant, y a une légende qui dit que t'en es un.
Le plus gentil des garçons.